HWANG SOK-YONG: LE VIEUX JARDIN
MARDI 22 NOVEMBRE 2005
A HORS-CIRCUITS
 
4 rue de Nemours 75011 Paris
 
de 19h à 20h30
 
signature/rencontre avec HWANG Sok-yong, auteur de Le Vieux jardin, adapté au cinéma par Im Sang-soo (Une femme coréenne), autour d’un apéritif coréen
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Hwang R.Gaillarde Gamma
 
HWANG Sok-yong
 
Hwang Sok-yong est né en exil, en 1943. Sa famille, qui a fui l’occupation japonaise, se réinstalle à Pyongang à la libération en 1945. L’enfant est alors témoin des bouleversements qui déchirent le pays – la guerre de Corée, qui commence en 1950. Avec la partition selon le 38e parallèle, il devient de fait un citoyen sud-coréen. Très vite, il oppose à la carrière de médecin qu’on lui destine sa passion pour la littérature.
 
L’auteur fait ses débuts littéraires en 1962 avec La Pagode, nouvelle qui reçoit le prix du Nouvel An du journal Chosun Ilbo. Déjà, son écriture se caractérise comme un mélange d’intimisme et d’innovation narrative. En 1966, il est enrôlé dans le corps expéditionnaire sud-coréen au Viêt Nam, se battant malgré lui pour la cause américaine. Il est chargé du « nettoyage » : effacer les traces des massacres de civils, et enterrer les morts – expérience qui lui inspirera l’Ombre des armes (1985).
 
Hwang Sok-yong publie ensuite un récit épique, Jang Gilsan, succès en Corée du Sud autant qu’au Nord. Le roman, qui se vend à plus d’un million d’exemplaires, utilise la parabole d’un bandit du temps passé afin de décrire la réalité de la dictature sud-coréenne en déjouant la censure.
 
Il écrit aussi pour le théâtre. Plusieurs membres d’une troupe perdent la vie en jouant
l’une de ses pièces lors du soulèvement de Kwangju en 1980. C’est à cette époque que
Hwang Sok-yong passe du statut d’écrivain engagé, vénéré par les intellectuels, à celui d’homme d’action qui participe directement à la lutte. Il lance alors une station de radio clandestine, « La Voix de Kwangju libre ».
 
En 1989 il se rend à Pyongyang, Corée du Nord, via Tôkyô et Pékin, en tant que représentant du mouvement démocratique naissant. Ce passage illégal au Nord lui vaut d’être considéré comme un espion par les services d’enquête criminelle de la Corée du Sud. Plutôt que de retourner au Sud, il choisit de s’exiler à New York, et Berlin. La chute du mur transforme sa vision du monde : « Après la guerre du Viêt Nam, mon écriture a changé une première fois, la deuxième fois cela a été après mon exil à Berlin (…). Avant, le réalisme objectif, critique, m’importait. Après, j’ai commencé à m’intéresser à ce qui est de l’ordre de l’intime, du quotidien. (...) Et j’ai senti à Berlin qu’il existait une sorte d’universalité dans le monde que je n’ai pas vue lorsque je me trouvais en Corée. » (entretien à Libération, mai 2002.)
 
En 1993, Hwang Sok-yong retourne à Séoul, se sachant pourtant voué à l’incarcération – « un écrivain doit vivre dans le pays de sa langue maternelle » affirme-t-il. Après sept ans de prison pour atteinte à la sûreté nationale, il est enfin gracié à l’arrivée du président
Kim Dae-jung en 1998.
 
En 2000, après une interruption de dix ans, Hwang Sok-Yong publie Le Vieux Jardin, « requiem décrivant la vie intérieure de la génération des années quatre-vingt qui rêvait d’une vie meilleure ». Le livre connaît un succès considérable.
 
En 2002 paraît L’Invité, roman majeur dans son œuvre, qui revisite la période précédant immédiatement la guerre de Corée et dans lequel Hwang Sok-yong jette un éclairage nouveau sur les massacres imputés aux Américains.
 

 
LES PLAIES OUVERTES DE LA DICTATURE : Hwang Sak-yong et l’existence brisée d’un dissident, broyé par la répression (extrait de l’article paru dans Le Monde le 21/10/2005 signé Philippe Pons)
 
Le vieux jardin de Hwang Sok-yong
Traduit du coréen par Jeong Eun-jin et Jacques Batilliot
Editions Zulma, 568 pages, 23 euros
 
Dans ce long roman, au fil des méandres du souvenir, Hwang Sok-yong se découvre plus qu'il ne l'a jamais fait dans ses oeuvres précédentes (1). A travers le regard d'un homme brisé par dix-huit ans passés à l'isolement en prison et qui renoue les fils de ce que furent sa vie et sa lutte contre la dictature militaire, il puise la force narrative de ce récit romanesque dans ce qu'il a vécu, ressenti, partagé avec une génération dont beaucoup sont morts torturés, exécutés, conduits à la démence, et d'autres, comme son héros Hyonu, ont « perdu » leur jeunesse derrière les barreaux. Au soir d’une vie ravagée, libéré par une remise de peine, Hyonu, qui a l’âge de l’auteur (né en 1943), déambule dans ce « vieux jardin » qui est à la fois son passé et l’utopie des idéaux pour laquelle il s’est battu.
[…] Ce grand roman est un témoignage émouvant dans son dépouillement dédié à une génération de Coréens qui avaient cru pouvoir changer le monde. Ils y contribuèrent en forçant le passage de la dictature à la démocratie et c’est leur fierté. Mais chez beaucoup- comme c’est le cas de Hyonu, rompu par l’épreuve carcérale- l’amertume perce sous la nostalgie.
Il y a dans l’histoire de la Corée moderne une grande coupure : Kwangju. Le nom de cette ville du sud-ouest de la péninsule a pour les Coréens une forte puissance évocatrice, émotionnelle et symbolique : c’est là qu’eut lieu en 1980 un massacre de civils par les troupes spéciales- le plus grand crime de la dictature. Plus de 200 morts (officiellement) et des milliers de blessés, mitraillés, chargés à la baïonnette. Le régime ne se contentera pas de tuer, il jeta en prison des milliers de militants. C’est le cas de Hyonu.
La clandestinité du dissident, la « cavale » puis les geôles non chauffées dans un pays où l’hiver il gèle à pierre fendre, le givre sur les murs, « l’haleine qui s’élève comme une fumée de cigarette », les grèves de la faim, la torture, le temps qui s’étire, l’homme qui, les mains menottées dans le dos, happe sa pitance comme un chien… Hwang qui fut emprisonné sept ans connaît ce qu’il écrit.
Au-delà de ce récit saisissant de vérité pour ceux qui ont connu la Corée des dictatures, la beauté du roman tient beaucoup à un autre personnage : Yunhi, la femme qu’aima Hyonu qui « restée dehors », poursuivit leur combat un peu malgré elle […].
Dans cette remontée dans le passée se dessine la figure attachante d’une femme qui raconte l’attente d’un homme condamné à la prison à perpétuité, d’une femme broyée elle aussi, comme le furent son père puis son amant, par la fatalité d’une époque. Une femme qui fait face mais en laquelle, écrira-t-elle à la fin de sa vie, « toutes les valeurs du passé semblaient se faner ». Une mélancolie qui fait écho, à plusieurs années de distance, à ce regret infini qui naît dans le sillage de tout bonheur perdu, dont Hyonu lui faisait part dans une lettre de prison : le regret que « notre vie n’aie pas duré quelques mois de plus, ou quelques semaines. Un jour de plus ». « Toi au dedans et moi au dehors, nous avons vécu ce monde. Ce fut parfois difficile mais réconcilions-nous avec les jours passées », lui écrit-elle, peu avant de mourir.  
Hwang Le vieux jardin
 
Le vieux jardin
 
Libéré après dix-huit années de prison, l’opposant politique O Hyônu apprend que Han Yunhi, la femme qu’il a aimée, est morte. Elle lui a laissé des lettres, son journal, des carnets et dessins. Désemparé, perdu dans une Corée qui a considérablement changé, O Hyônu se remémore ses années d’utopie et de lutte clandestine, sa rencontre avec Han Yunhi, leurs quelques mois d’idylle hors du temps, puis les années d’enfermement. Surtout, il se plonge, passionnément, dans le Journal que Han Yunhi a écrit pour lui durant toutes ces années, revivant l’itinéraire de la jeune artiste peintre des années 1970 aux années 1990, son implication dans un réseau de résistants, son séjour en Allemagne, la chute du mur de Berlin. Se dessine alors un magnifique portrait de femme.
Hwang Sok-yong, quant à lui, définit cette magistrale œuvre romanesque, à caractère fortement autobiographique, comme le « portrait d’une génération qui a voulu réaliser le rêve d’une vie meilleure ».
 
Im Sang soo Une femme coréenne Im Sang-soo Tears
Une femme coréenne de Im Sang-soo
Tears de Im Sang-soo
 
Le vieux jardin est actuellement adapté au cinéma par le réalisateur Im Sang-soo dont on a pu voir sur les écrans français Une femme coréenne (2003), en festival Tears (2000) et Girls night out (1998); en salle actuellement The president's last bang
 
Im Sang-soo The president's last bang
 

 
voir une vidéo autour du livre: par ici
 

 
BIBLIOGRAPHIE
(livres parus en langue française, tous publiés aux éditions :: Zulma ::)
 
Monsieur Han, récit terrifiant de la vie d’un médecin pendant la guerre de Corée et dans les années qui ont suivi, Monsieur Han décrit la séparation des familles au moment du conflit, drame que l’actualité a remis aujourd’hui, cinquante ans plus tard, en pleine lumière. Oeuvre essentielle de la littérature coréenne contemporaine.
 
Hwang Monsieur Han
 

Auteur courageux et dissident du temps de la dictature, Hwang Sok-yong est adulé par les étudiants et les intellectuels coréens. Il a obtenu de nombreux prix littéraires et fait partie des quelques écrivains qui sont lus et appréciés aussi bien au Sud qu’au Nord. Très ancrée dans l’histoire contemporaine de la Corée, son œuvre est toujours d’une vibrante actualité politique alors que se dessinent les premiers mouvements vers une possible réunification. Et les critiques littéraires coréens voient volontiers dans quelques scènes de Monsieur Han certaines des plus belles pages de la littérature coréenne contemporaine. C’est le premier livre de l’auteur traduit en français.
 
La Route de Sampo, quatre nouvelles emblématiques de l’œuvre de Hwang Sok-Yong, dont plusieurs ont donné lieu à des films pour le cinéma et la télévision.
Dans La Route de Sampo, devenu un classique du patrimoine littéraire coréen, Jong et Yongdal, des ouvriers journaliers en quête de travail, rencontrent en chemin, dans la campagne enneigée, une prostituée en fuite. Une affection pudique se noue entre elle et Yongdal.
 
Hwang La route de Sampo
 

L’Ombre des armes : Le jeune Anh Yeong-Kyu, caporal dans l’armée coréenne pendant la guerre du Viêt-Nam, est retiré de son unité qui se bat sur le front dans la jungle. Il débarque alors dans la ville portuaire de Da Nang où il est affecté au département d’enquête coréen rattaché au quartier général des forces alliées. Il doit évoluer entre le gouvernement vietnamien du Sud et l’armée américaine pour surveiller le marché noir qui fait rage et sert en plus de couverture au Front National de Libération du Nord.
Trafics, contrebandes, opérations militaires américaines entraînant barbarie, exactions, tortures, viols, et attentats des forces du Fnl tissent la trame du roman où Anh Yeong-Kyu côtoie pour le meilleur et pour le pire Oh Hae-Jong (Coréenne en exil et femme de Pham Quyen, commandant de l’armée sud-vietnamienne, frère de Pham Minh, engagé clandestin dans le Fnl), Tôi, son collaborateur vietnamien, Stapley, soldat déserteur américain, et toute une galerie de personnages hauts en couleur.
 
Hwang L'ombre des armes
 
L’auteur, qui a personnellement vécu cette guerre, situe son roman dans les années 1967/1968. D’abord paru en 1983 en feuilleton dans le mensuel Wolgan Joseon, puis en deux volumes en 1985 et 1988, et enfin dans une ultime version en 1992, l’Ombre des armes est un des rares romans abordant l’implication de la Corée dans la guerre du Viêt-Nam.
Une immense fresque historique pleine de violence et passion au milieu de la corruption collective et des espoirs les plus fous.

 
Les Terres étrangères : en Corée du sud, sur les côtes de la Mer Jaune, dans les années soixante-dix, dupés, dépossédés, les ouvriers en exil d’un chantier de construction national ne supportent plus leurs conditions de vie. Mal logés, mal payés et mal nourris en échange d’un travail pénible et dangereux, ils cherchent à se révolter et organisent une grève. Des meneurs comme le Capitaine ou Donhyuk sont prêts à tout pour obtenir leurs revendications. Jusqu’au sacrifice de leur vie. La tension est extrême, l’atmosphère lourde, mais demeure toutefois le mirage d’une vie meilleure. Une condition humaine tragique et cependant de toute beauté.
La Prospérité met également en scène la vie ouvrière, mais cette fois dans la périphérie de Séoul. Le vieux Kang ramène de sa tournée de chiffonnier le cadavre d’un chien pour faire bombance. Mais sa belle-fille revient enceinte de la ville et son beau-fils trois doigts coupés suite aux cadences infernales du travail en usine. Tout ce petit monde se croise dans la gargotte de Tokbae. Il faut boire pour oublier son existence misérable. Même si c’est parfois sous un ciel étoilé.
 
Hwang Terres étrangères
 
L’Invité : L’invité, c’est d’abord Ryu Yosop, pasteur coréen exilé aux États-Unis, amené à passer quelques jours en Corée du Nord pour y retrouver des membres de sa famille. Mais l’invité, c’est aussi un terrible fléau, importé en Corée par l’Occident : tant la variole… que les idéologies, porteuses de destruction et de mort.
Dans une forme littéraire audacieuse, inspirée d’un rite chaman destiné à consoler les âmes des défunts, Hwang Sok-yong revisite la période cruciale qui a précédé le déclenchement de la guerre de Corée. Les voix des vivants et des morts, victimes ou bourreaux, s’entremêlent – plaidant pour une réconciliation à travers le temps. Un récit halluciné, au caractère magique.
 
Hwang L'Invité
 

 
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