UNE NANA ÉPHÉMÈRE AU CINÉMA : HON DE NIKI DE SAINT PHALLE
A l’occasion de l’exposition Niki de Saint Phalle, Jean Tinguely, Pontus Hulten (20 juin 2025-4 janvier 2026) au Grand Palais- Paris, Hors-circuits vous propose Femina ridens en DVD et Bluray. Un film qui rend directement hommage à une sculpture monumentale de 1966, désormais détruite, de Niki de Saint Phalle.
 
La sculpture "Hon-en katedral" de Niki de Saint Phalle, installation temporaire exposée au Moderna Museet à Stockholm en 1966, est une œuvre emblématique qui a marqué l'histoire de l'art contemporain. Elle a été démolie après la fin de l'exposition. Aujourd'hui il n’en reste plus que des traces photographiques, un fin catalogue et un livre de 1967*. Mais on peut également la découvrir dans un film italien de 1969 : Femina ridens de Piero Schivazappa.
 
Piero Schivazappa, alors réalisateur de documentaires pour la RAI, était en reportage à Stockholm quand il a visité l’exposition au Moderna Museet. Il y découvre l’œuvre, la parcoure et imagine immédiatement comment l’intégrer au scénario de son film en préparation, Femina ridens. Il contacte Niki de Saint Phalle qui lui octroie le droit à l’image en échange du crédit au générique. Des photographies sont réalisées pour la maquette, la sculpture est reproduite dans un immense studio de la banlieue de Rome.
 
Hon-en katedral (« elle-une cathédrale » en suédois), représentait une femme allongée sur le dos, mesurant environ 25 mètres de long, 6 mètres de haut et 9 mètres de large. Les visiteurs pouvaient entrer à l'intérieur de la sculpture par une ouverture entre ses jambes pour accéder à divers espaces, dont un cinéma (projetant un extrait de Luffar-Petter, Erik A. Petschler, 1922), une cabine téléphonique, une galerie d'art, un aquarium et un bar à lait. Il s’agissait d’un lieu ouvert, auto-suffisant, une déesse-mère offrant une forme d’universalité indicatrice de l’énorme potentiel des femmes qui se cache derrière l’image du « sexe soumis ». Ce corps féminin envahissant placé directement au cœur de l'institution muséale perturbait ainsi les rapports de force au sein des réseaux artistiques et de la vie culturelle à une époque où la représentation des femmes et les positions de genre dans les arts étaient remises en question. Niki de Saint Phalle offrait avec sa Nana éphémère un héritage durable pour l’art féministe.
 
Nicki de saint phalle
 
Au-delà du rôle symbolique de Hon, le film de Piero Schivazappa intègre des éléments visuels et esthétiques typiques des œuvres de Niki de Saint Phalle, notamment l'utilisation de couleurs vives, de formes organiques et de motifs pop art. Ces éléments contribuent à créer une atmosphère unique et reconnaissable, inspirée par l'art de Saint Phalle. Les deux œuvres explorent des thèmes similaires liés à la création et la sexualité, à la féminité, au pouvoir féminin et aux dynamiques de genre. Hon célèbre le corps féminin et critique les normes sociales, tandis que Femina ridens (littéralement « la femme qui rit ») aborde des thèmes de domination, d’emprise et de fascination.
 
Nicki de saint phalle
 
L’édition vidéo (label Frenezy) de ce thriller érotico-pop désormais culte propose en guise de suppléments trois longs entretiens d’une grande qualité évoquant la place prépondérante des œuvres d’art au sein du film et en particulier le travail de la plasticienne Niki de Saint Phalle et le courant de l’Op art:
 
Femina Art : Niki de Saint Phalle par Catherine Francblin, critique d’art et auteur d’une biographie sur Niki de Saint Phalle, Niki de Saint Phalle. La révolte à l’œuvre (éd. Hazan).
 
Femina Cinéma : décryptage du film par Jean-François Rauger, directeur de la programmation à la Cinémathèque française.
 
Femina Op : entretien avec Pauline Mari, historienne de l’art et spécialiste de l’art cinétique, auteur de L’art assassin: histoires de crimes au cinéma (éd. Rouge Profond).
 

Femina ridens 1969 • Theatrical Trailer (US)
 

Le film Femina ridens: Le docteur Sayer (Philippe Leroy) dirige une grande fondation philanthropique. Riche et bien éduqué, il considère la femme comme un être inférieur qu’il se plaît à soumettre à sa domination totale… jusqu’à la mort. Un soir, il attire Maria (Dagmar Lassander), une jeune journaliste qui enquête sur lui et la séquestre dans sa villa spécialement aménagée… S’installe alors un jeu dangereux…
 


 
Construction de la sculpture (mise en ligne du film par Le Grand Palais) > par ici
 
Lire l’essai de Annika Öhrner (©Stedelijk Studies Journal) sur l’installation Hon > par ici
 
Lire l’article de Culturopoing sur le film Femina ridens et les suppléments > par ici

 

* Hon-en katedral: Hon-en historia, Moderna Museet Stockholm Sweden, 1967
Nicki de saint phalle
 
Niki de Saint Phalle (1930-2002) est l’une des artistes les plus populaires du milieu du XXe siècle, à la fois plasticienne, peintre, sculptrice et réalisatrice de films. Si elle est surtout connue du grand public pour ses célèbres « Nanas », son oeuvre s’impose aussi par son engagement politique et féministe et par sa radicalité.
 

 

 

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